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Edouard, un kedgeur expatrié à Singapour
Les étudiants du pro-act "Kedge Alumni Travel" d'Asie sont actuellement à Singapour, où ils viennent à la rencontre de nos diplômés expatriés.
- PROMOTION : 2001
- POSTE : Sales Director Fine Fragrance Asia
- ENTREPRISE : FIRMENICH
- DURÉE D'EXPATRIATION : 2 ans et demi
INTERVIEW :
Présentez-vous en quelques mots...
Je m’appelle Edouard Clère, j’ai 42 ans, je suis originaire d’Alsace et cela fait un peu plus de 2 ans que je vis à Singapour. J’ai réalisé une classe préparatoire à Lyon avant d’intégrer l’Ecole de Commerce de Bordeaux en 1997 et j’en suis sorti diplômé en 2001.
Quel est votre poste actuel ?
Actuellement je suis Sales Director pour l’entreprise Suisse Firmenich, une maison de création de Parfums. Je m’occupe donc de la partie "Sales", c’est à dire que je vends les créations de parfumeurs aux marques mais je suis également en charge de la partie Business développement. La vente des parfums s’effectue essentiellement auprès de marques locales dans toute l’Asie, dont j'ai la charge excepté la Chine, qui représente un marché à part entière (business unit autonome). En travaillant en Asie du Sud-Est, j’ai l’opportunité de beaucoup voyager car la majorité de mes clients sont situés à l’extérieur de Singapour. Par an, cela représente une quarantaine de déplacements, essentiellement en Malaysie à Kuala Lumpur (day trip), au Vietnam (2-3 jours), aux Philippines, en Indonésie et en Thaïlande (3-4 jours), et enfin au Japon et en Corée du Sud (une dizaine de jours).
Quelles sont les différences majeures par rapport à la France en tant que business developper, différentes méthodes ou autre au niveau de la négociation ?
Pour ma part cela fait 20 ans que je travaille dans la vente et dans différents secteurs tels que : le chocolat, la musique, les cigares, le champagne, le recrutement, les technologies pour une startup et désormais dans le parfum. Je vois trois interrogations pouvant amener à répondre à cette question : est-ce que la vente est la même en terme de méthodes ? Est-ce que cela dépend du secteur et du produit ? Et enfin, est-ce que la dimension internationale a un impact ?
Selon moi il y a de nombreux points communs en matière de techniques dans la vente, mais également au niveau des phases et étapes dans une négociation. Concernant les dimensions culturelles, cela peut impacter la durée de transformation par exemple, en fonction des types de ventes : ventes one shot, moyen ou long terme. De plus, il faut considérer chaque culture comme étant bien distincte. En effet, l’Asie est une mosaïque de cultures et de diversités où il faut s’adapter et bien comprendre les histoires et sensibilités. Ainsi, dans la vente en Asie il faut soigner sa communication et adapter son discours vis à vis des différents interlocuteurs.
Quel a été votre parcours à Kedge et est-ce que cela vous a aidé à orienter votre parcours professionnel ?
Je faisais partie des personnes qui ne savaient pas ce qu'elles voulaient faire. J’ai donc fonctionné par élimination en me demandant ce que je ne voulais pas faire afin de ne pas être déçu. J’ai choisi de faire une école de commerce puisque je trouvais cette voie assez généraliste permettant d'avoir une vision assez globale du monde de l’entreprise. Ayant fait des stages de vente prometteurs et étant à l’aise avec le business development, j’ai naturellement choisi de me spécialiser dans le marketing-vente car je trouvais cela indissociable et très intéressant. Le secteur de la vente est tourné vers la relation, la communication et l’échange avec les prospects, et parallèlement le marketing soutient la vente en apportant du rationnel, des supports, des présentations qui donneront plus d'impact aux vendeurs tout en les aidant dans leur stratégie client.
Etant dans la vente depuis plus de 20 ans et dans différents secteurs, j’ai appris qu’il était assez simple de passer d’un secteur à un autre. En effet, que cela soit en B2B ou B2C, les secteurs et produits peuvent s’apprendre, il suffit d’être assez motivé, curieux, d’avoir une personnalité adaptable, un bon relationnel et de bonnes capacités de vendeur. Pour ma part, le fil conducteur cela a été la vente mais de produits sympathiques liés à l'univers du Luxe, j’ai plus de facilité à vendre des produits qui me parlent et me passionnent.
Il y a différentes étapes lors d’une prise ou d’un changement de poste : la première année, la plus compliquée puisqu’il faut découvrir et apprendre le produit, l’entreprise, il y a potentiellement tout à construire si c’est une création de poste. La deuxième année permet la montée en puissance au sein de l’entreprise, le travail commence à porter ses fruits. Et la troisième année peut s’apparenter à une zone de confort puisque l’on s’est constitué son portefeuille clients, et l’on est bien intégré à l’entreprise. Après ces trois ans, on peut décider de changer de secteur our de fonction si on perd une certaine motivation afin de se challenger. Pour ma part, c’est souvent à la suite de cycle de trois ans que je décide de me re-challenger.
Nous avons vu que vous étiez engagé dans plusieurs projets humanitaires dont un depuis septembre en Indonésie, pouvez-vous nous en parler?
Je considère que l’épanouissement ne s’exprime pas seulement dans le travail mais également dans les activités extra-professionnelles : que ce soit les passions, le sport ou bien l’engagement associatif. En effet, j’ai toujours eu beaucoup de plaisir à donner de mon temps, j’ai cette chance de pouvoir contribuer à des causes humanitaires. J’ai tout d’abord commencé avec les Semeurs d’espérance à Paris afin d’aider les sans-abris dans les rues. Puis, j’ai fait de la prestidigitation et des spectacles de magie avec Magiciens du monde dans les hôpitaux pour les enfants handicapés et dans les maisons de retraite. De même, après avoir travaillé dans le recrutement, j’ai rejoint le Club Emploi Cadres St Vincent et ai été pendant 7 ans Coach bénévole de jeunes cadres en recherche d’emploi, car ces recherches peuvent s’avérer difficile et pénible si l’on est seul. Moi-même avant d’être recruté à mon poste actuel, j’ai eu la chance d’être coaché par un des membres de cette association. Selon moi, c’est le cycle de la vie que de rendre des services et que l'on vous en rende en retour, on est fait pour s'entraider.
Cette année, j’ai décidé d’aider deux foyers d’enfants défavorisés en Indonésie. Le premier foyer se trouve sur l’île de Batam à une heure en bateau de Singapour, il s’adresse à des enfants de moins de 13 ans. Or, ce foyer compte une centaine d’enfants avec seulement deux bonnes soeurs pour s’en occuper. Ainsi, mon rôle est d’assurer le lien entre l’île où subsistent encore des bidonvilles et Singapour où il y a beaucoup de richesses et de ressources. J’essaie ainsi de lever des fonds afin d’améliorer l’accès à l’eau, pouvoir envoyer des familles s’occuper et s’amuser avec les enfants car les deux soeurs ne peuvent pas s’en charger seules. De même, concernant la nourriture, les enfants ne dépendent que des dons. On se doit donc d’améliorer leur alimentation, mais aussi trouver des vêtements et envoyer des médecins et dentistes sur l’île. Le deuxième foyer se trouve sur l’île de Bintan, il accueille des enfants plus âgés (de 13 à 18 ans), plus autonomes et moins nombreux (une trentaine). De plus, il y a deux volontaires des Missions étrangères de Paris (les MEP) pour s’en occuper. Mais il subsiste des problèmes liés à l’accès l’eau potable : le foyer se fait livrer de l’eau potable tous les jours ce qui coûte extrêmement cher. Finalement, j’assure un rôle de coordination dans ces missions, et je me rends compte que beaucoup de personnes sont prêtes à donner de leur temps, il faut simplement les motiver afin de faire avancer les choses.
Pourquoi êtes-vous venu à Singapour et comment avez-vous vécu votre intégration ?
Etant arrivé à Firmenich Paris en février 2014 et m’occupant de la zone Centrale/Eastern Europe & Africa, j’ai eu l’opportunité de rejoindre les bureaux de Singapour à la suite d’un départ. En effet, l’ancien collaborateur est parti à la concurrence laissant donc un poste vide pour ce secteur asiatique qui ne pouvait rester sans Sales Director : j’ai donc saisi cette opportunité. De plus, sur mon ancienne zone j’avais la connaissance de marchés spécifiques tels que l’Afrique et l’Europe de l’Est, et puis j’étais personnellement mobile rapidement et internationalement.
Je suis donc arrivé durant l’été 2017 à Singapour avec un contrat de 3 à 5 ans. Tout passe extrêmement vite ici, j’ai l’impression d’être arrivé hier, cela est notamment dû aux semaines très chargées, aux déplacements fréquents, à l’absence de saisons (28 degrés toute l’année), à la pratique d’activités sportives et aux engagements associatifs.
Qu’est-ce qui vous a surpris en arrivant à Singapour et qu’est-ce que vous aimez le plus ici ?
Singapour est considérée comme la Suisse de l’Asie, c’est une ville où le coût de la vie reste assez cher, c’est propre, sécurisé et vert. C’est une ville-île-état et un cocon à la fois. Ce qui est sidérant reste l’honnêteté des habitants, puisque le vol reste très rare et les objets perdus sont très souvent retrouvés. Singapour n’est pas une démocratie ni même une dictature, je dirais que c’est un peu comme une 'démocrature'. En effet, il y a beaucoup de contrôle et de caméras, il y a encore la peine de mort, les sévices corporels... ce côté strict reste rassurant cependant tout le monde ici est assez conformiste et formaté, voire trop, ils me font parfois penser à des robots ! Mais pour les étrangers on a quand même beaucoup de libertés, je dirais que le compromis n’est pas désagréable. De même pour les familles c’est assez avantageux, il est plus facile d'être aidé avec des aides à domicile plus économiques qu’en France. Toute cette qualité de vie est non négligeable et le retour à la réalité est difficilement envisageable. Je pense que cette vie est agréable entre 3 et 5 ans mais beaucoup de choses françaises peuvent manquer telles que la culture, la gastronomie, l’architecture, la diversité, l’espace, le raffinement... tout l’héritage français, très riche.
Singapour ressemble beaucoup à Dubaï puisqu’il y a 50 ans il n’y avait rien donc tout est récent et neuf. Cette ville fonctionne cependant très bien et affiche une belle croissance économique : elle attire beaucoup d'entreprises étrangères qui veulent rayonner en Asie. Son seul point faible est qu'elle est très dépendante de l’extérieur puisqu’elle ne produit rien au vu de l’espace très limité.
Qu’est-ce que vous auriez à dire aux diplômés et futurs diplômés qui souhaiteraient s’expatrier à Singapour ?
Si vous avez la possibilité de vous expatrier à Singapour, saisissez cette chance. Il faut garder en tête que le coût de la vie ici reste assez élevé, Singapour reste l’une des villes les plus chères au monde. La santé et l’éducation restent également onéreuses même si l’alimentation est plutôt abordable. Mais selon moi, si vous avez l'opportunité de venir à Singapour ou à l'international, n'hésitez pas !
Interview réalisée à Singapour par Clémence, Stivell, Estelle et Adel, étudiants du pro-act KEDGE Alumni Travel d'Asie.
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