Les hommages se multiplient et les larmes ne cessent de couler depuis l'annonce de sa disparition ce samedi 10 avril 2021, après plusieurs mois de lutte contre la Covid-19. Jeff Carias, ancien étudiant de l'ESC 1992 à KEDGE devenu publicitaire, producteur, puis journaliste, était un touche-à-tout reconnu et très actif dans le monde de l'entreprise et du théâtre. Il était aussi un homme généreux et engagé, notamment en présidant l'association "Les enfants de Togbota", qui oeuvrait pour l'enseignement au Bénin.
Pour prolonger l'engagement de Jeff et continuer à faire vivre son projet, sa famille a souhaité : "Ni fleurs ni couronnes : uniquement des dons sous forme de chèque à l’ordre de l’Association « Les enfants de Togbota », à adresser 36 rue Saint-Jacques (13006 – Marseille) ou en ligne ici."
Jeff était également apprécié pour son humour décapant, ses parodies, et les vidéos qu'il publiait régulièrement sur les réseaux sociaux.
Toute l'équipe de KEDGE Alumni se joint à la Direction et au personnel de l'école pour adresser ses plus sincères condoléances à ses deux enfants, Lisa et Bastien et leur maman Corinne, à sa famille, à sa compagne Marion et ses nombreux amis et proches. Ceux qui l'ont connu savent à quel point sa disparition est douloureuse.
Fervent supporter de l'OM, le club lui a rendu hommage, tout comme de nombreux médias et personnalités politiques locales.
De nombreux diplômés de l'école lui rendent hommage sur les réseaux sociaux
Professeur à KEDGE quand Jeff y étudiait, Bruno Camus a tenu à lui rendre hommage par ces quelques mots :
"À une époque ou la personnalité constituait le critère de recrutement prédominant à l’ESC Marseille alors, Jeff avait démontré dès le début, qu’il en incarnait l’esprit et la lettre. Ses talents d’animateur et d’acteur étaient déjà prégnants lors des événements organisés à l’école. Je me souviens de cette interview qu’il m’avait demandée pour la cérémonie de remise des diplômes du PGE (j’étais alors professeur et directeur de la filière Manager Commercial), au cours de laquelle il m’avait malicieusement conduit à parler de mes passions. Il l’avait diffusée lors de la soirée, mais en ayant modifié les questions, ce qui avait produit un magnifique effet comique teinté de beaucoup d’affection.
C’était cela Jeff : des idées en pagaille, un humour dévastateur, mais aussi une gentillesse et une sensibilité à fleur de peau. Il a su en faire son métier et devenir une « vedette » sans jamais oublier ses racines, ses amis, et son école à laquelle il a tant donné.
Il demeure à jamais, l’un des étudiants qui m’aura le plus marqué, et fait rire aussi."
Jean-François était un homme de partage, dans sa vie professionnelle et dans sa vie privée.
Professionnellement
La voie artistique semblait lui être prédestinée tant dès l’école il a su faire de chaque instant, un acte de création en soi. On se souviendra du Rap du 202 qui avait emporté l’adhésion de toute une école et qui était déjà le signe d’un tempérament impertinent et un homme presque sans peurs. Sans peurs ? En fait, non. À chaque ligne écrite, à chaque pièce de théâtre, à chaque mise en scène, il était traversé par ce doute qui fait de vous un être exigeant déjà avec vous même. Cela caractérise Jean-Francois, un homme de texte et de situations. J’ai en mémoire les répétions de sa première pièce de théâtre dans les locaux de Kedge, une école qui ouvrait déjà ses porte aux artistes. Amphi B. Il m’avait demandé d’être là pour le rassurer (à l’époque je co dirigeais un théâtre). La pièce de théâtre fit salle comble et fut jouée dans un vrai théâtre. Un succès énorme pour un jeune auteur. Elle permit à ses amis de faire partie de l’histoire et d’être sur scène « pour de vrai ». Pudique, il était capable de se terrer dans sa loge.. par humilité . Il se sentait toujours gêné par les compliments. Il fonda cette association remarquable « les enfants de Tobogta » . L’appel lancé pour continuer cette action est importante pour ses proches . Et j’invite les anciens à y participer .
Personnellement
Impossible de ne pas évoquer son amitié fidèle pour chacun de ses amis. Celui qui veille, celui que l’on peut appeler à des heures inavouables pour parler, trouver une solution voire faire une énième boutade. Durant ces deux mois et demi , Jeff a pu compter sur le soutien de ses amis dans l’ombre sans faille, discrète, bienveillante et aimante . On ne peut les citer tous, mais Jean-Pierre, David, Carlo, Christophe, Jean-Marc... déjà là ces noms me viennent comme cela spontanément . . Mais il y en a beaucoup d’autres . Jeff était là pour sa famille, pour ses proches et pour quiconque croisait sa route. Le meilleur hommage que nous puissions lui rendre est sûrement de conserver cet état d’esprit impertinent, profond en cultivant des liens aussi forts que ceux qu’il avait tissé autour de lui.
C’est une promesse à l’ami disparu .
Dans un long post sur sa page Facebook, son camarade de promo Aymeric Warmé-Janville rend hommage à Jeff :
Jeff Carias n'était pas un ami proche, un copain de promo, mais un copain de qui je me sentais proche.
Lorsque j'avais lancé il y a quelques mois un appel pour mon projet de livre de témoignages solidaires, il m'avait proposé le sien, pour son soutien à l'éducation en Afrique.
Je sais que c'était quelqu'un de profondément humain, souvent dissimulé derrière les multiples personnages qu'il avait créés au fil des années.
Je viens de relire le portrait que j'avais fait de lui à l'occasion des 10 ans de la promo 92 de l'ESC Marseille.
Inutile de chercher des mots pour lui rendre hommage, ce sont les siens qui le font le mieux.
Je regrette que nos chemins ne se soient pas croisés plus souvent.
Profitons de la vie avec sourire et humanité, c'est ce que nous avons de mieux à faire pour honorer sa mémoire.
"je ne renie rien de mon passé de 'perturbateur' si ce n'est la peine que j'ai pu faire à certaines personnes"
Il semblait impensable que l'organisateur des retrouvailles de la promo 92 pour son dixième anniversaire ne fasse pas partie de cette galerie de Portraits de Marseillais. D'autant plus que si tout le monde sait qui il est, peu le connaissent...
-Juillet 1968: naissance à Meudon, où il vit dix sept ans
-Juin 1992: à peine diplômé, devient Directeur Général du Cercle des Nageurs de Marseille, premier club français de natation.
-Janvier 1995: démissionne du CNM pour rejoindre Maxime Crener au CERAM en tant que Responsable de la Communication Interne et des Relations avec les étudiants.
-1995: écriture de son premier livre (non publié à ce jour): "À dada sur ma bridée"
-1996: création, avec Laurent Cardaire (également promo 92), de l'agence C2 COM qui devient deux ans plus tard Groupe C2 SA.
-1999: naissance de sa fille Lisa.
-2001: décide d'organiser l'anniversaire des dix ans de la promo 92 le 4 mai 2002 à Marseille.
Vrai gentil ou faux méchant? Ou Vice versa? Fort en gueule, Jeff a laissé le souvenir d'un personnage pas toujours consensuel et difficile à cerner. Aujourd'hui encore, il entretient le doute quand on lui demande comment il ferait son propre portrait: "j'emprunterais le style cubiste car je pense ne pas être quelqu'un avec une image lissée. Chacun y verrait ce qu'il a envie d'y voir. L'Art Moderne, que j'adore, permet à l'imagination de vagabonder et je pense que ce style permettrait de renvoyer assez justement mon image..."
On essaie d'en savoir plus en le faisant parler de lui, de son travail, de sa famille. "Qu'est-ce que je retiens de ces dix dernières années? La création de mon entreprise. J'aurais pu répondre la naissance de ma fille, mais c'est un peu bateau comme réponse et je n'ai pas le pied marin." Effectivement il ne dira rien de sa fille, sinon qu'à son arrivée il a craint de ne pas avoir le temps de la voir grandir tout en dirigeant sa société. Finalement il s'en sort plutôt bien, même s'il aimerait passer plus de temps avec elle.
Celui qu'on aurait imaginé aspirant-entrepreneur eu égard à son caractère et à son passage par Marketing Méditerrannée recadre immédiatement son interlocuteur. D'abord sur son premier poste: "moi, à peine diplômé de l'ESC Marseille, classé 173ème de ma promotion, on m'offre un poste de cadre, bien payé et avec des responsabilités. Cela a été dur de passer de ma chaise de cours (où j'avais plutôt l'habitude de réfléchir à la prochaine connerie que j'allais faire) à un poste où j'avais directement placé sous mon autorité une dizaine de personnes toutes plus âgées que moi. Pas facile."
Ensuite sur la création de sa société: "je n'y pensais pas du tout! C'était pour moi réservé à une élite de gens courageux, prêts à sacrifier leur confort pour réaliser leur rêve d'entreprise. Et puis j'y suis venu quand Laurent m'en a parlé." Il saute le pas certainement autant par confiance en son associé que dans le projet lui-même. Le ton est sobre, humble, presque surprenant, quand il parle de cette expérience professionnelle et humaine: "C'est fou l'aventure que représente la création d'une entreprise. On se sent libéré d'un coup et en même temps, on se sent en danger. C'est valorisant, du point de vue personnel, de savoir que des gens payent leur loyer, partent en vacances, mangent grâce aux salaires que tu leur verses. Mais on se sent également terriblement responsable d'eux. On a eu du mal, au début, à manager notre équipe. Le turnover était impressionnant et je pense que nous étions les responsables de ces départs. Le fait d'être chefs d'entreprise nous mettait une pression sur les épaules que nous faisions partager à notre personnel. C'est une erreur que nous ne reproduisons plus."
On lui demande ce qu'il a appris en dix ans d'expériences professionnelles diverses et il répond sans hésitation: "à me méfier!". On aurait plutôt imaginé les autres se méfiant de lui! "Je suis encore très naïf mais je me soigne. Néanmoins je ne veux pas perdre complètement cette naïveté qui fait que je préfère penser que les personnes que je rencontre sont plutôt bonnes que mauvaises. Je me sers de mon expérience comme d'un détecteur. J'aurai encore des tas de surprises avec une telle approche mais grâce à elle, j'ai rencontré des gens magnifiques qui sont aujourd'hui des ami(e)s fantastiques. Quand on donne, on finit toujours par recevoir." Dans le milieu de la communication dans lequel il évolue, Jeff a l'image de quelqu'un de droit avec qui on travaille en confiance.
Aujourd'hui sa société, c'est un peu plus qu'une simple entreprise. Il aurait du mal à s'en séparer par exemple. Peut-être parce qu'il y a trop de lui dedans. "Je préférerais lâcher un peu prise et me reposer sur des collaborateurs qui la feraient tourner pour moi. Ce serait idéal." Jeff n'est pas un pur entrepreneur, il y met trop de coeur. "J'aime ce que je fais. J'aime imaginer, créer, modifier une image. Tu ne peux pas savoir la gratification et l'honneur que j'ai ressenti quand j'ai vu notre premier affichage. C'était un mercredi matin, au lever du jour. Je partais faire mon jogging et j'ai vu une voiture de Decaux immobilisée avec un technicien en train de poser l'affiche dans un abri-bus... Grand moment de fierté. Maintenant, je cours après un spot de cinéma et je rêve un jour de créer une pub télé! Pas de raison immédiate d'arrêter."
Malgré son emploi du temps chargé, il prend en plus l'initiative d'organiser une fête pour les dix ans de sa promo. Pourquoi? "Parce que j'aime les retrouvailles. J'aime voir de la joie chez les gens. J'ai l'impression de créer du bonheur. J'ai toujours préféré offrir des cadeaux qu'en recevoir. Et puis j'avais peut-être aussi envie de rencontrer des gens à côté de qui je suis passé pendant trois ans. J'ai envie d'aller au devant de tous ceux qui ne me connaissent pas et que je ne connais pas encore. J'ai vraiment soif de rencontre et l'organisation de cet anniversaire est une formidable occasion de l'étancher."
Pour l'instant il rêve de voyage. De quinze jours à Tahiti pour "juste glander". Il aimerait aussi écrire pour des sitcoms ou pour le théâtre, "une pièce sur le foot, une pièce drôle qui aurait tellement de succès qu'elle serait reprise à Paris et jouée plus de mille fois par des stars! Tu vois un peu mes envies!" Plus sérieusement, il dit avoir envie d'apprendre encore.
Revenant à son portrait et à l'image qu'il donne de lui-même quand on ajoute: "alors vrai gentil, faux méchant ou gros con qui parle fort?" Il répond non sans humour: "suis-je vraiment gros et est-ce que je parle fort?" Et avoue finalement: "je ne renie rien de mon passé de 'perturbateur' si ce n'est la peine que j'ai pu faire à certaines personnes. Quand j'y repense, je culpabilise énormément même si, encore maintenant, j'y repense aussi en souriant..."
Interview réalisée par e-mail du 25 février au 29 avril 2002
Nous avons tenté de répertorier tous les hommages publics que vous avez rendu à Jeff sur les réseaux sociaux. Cependant, la confidentialité des profils de chacun ne nous permet pas de tous les voir.
Si vous êtes diplômé de l'école et que vous aussi vous souhaitez rendre un dernier hommage écrit à Jeff, n'hésitez pas à le publier en commentaire ci-dessous, en vous connectant à votre profil KEDGE Alumni (tous les diplômés en ont un, et vous pouvez récupérer vos accès rapidement en suivant cette procédure).
VOUS ÊTES NOMINÉ(E), VOUS LANCEZ UN PROJET, UNE START-UP ?
0 Commentaire
Vous devez être connecté pour laisser un commentaire.
Aucun commentaire